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Abelé 1757
1757
Benoit Deloffre dans le potager de l'Assiette Champenoise - Champagne Abelé 1757

Benoît Deloffre, maraîcher trois étoiles

18 octobre 2021

Benoît Deloffre compte parmi les maraîchers les plus en vue de sa génération. En quinze ans, ce passionné du végétal est devenu la référence des chefs étoilés Français et internationaux. Une renommée qu’il partage avec sa femme et les 400 variétés de légumes rares et oubliés qu’il cultive sur son exploitation de Romain près de Reims (51). Pour Abelé 1757, Benoît Deloffre nous reçoit dans le potager de son ami, Arnaud Lallement, chef triplement étoilé de l’Assiette Champenoise***.

Les métiers de la terre sont réputés pour être durs. Qu’est-ce qui vous a poussé à rejoindre l’exploitation familiale pour devenir maraîcher à votre tour ?

Si j’avais dû faire un choix de raison sans connaître l’avenir, je n’aurais sûrement pas choisi cette voix. Mais la question ne s’est pas vraiment posée. Après des études de commerce, j’aurais pu partir dans plein d’autres voix, mais j’avais passé toute mon enfance dans cet univers. Il y a un attachement qui est très fort. Cela fait trois générations que l’on cultive les mêmes terres dans ma famille. Des terrains où mes arrière-grands-parents, mes grands-parents ont transpiré. À 12 ans, je prenais déjà le tracteur pour labourer les terres. Quelque part, j’étais formé pour ce métier sans faire d’école agricole. Ces moments ont bercé mon enfance.

Mains de Benoît Deloffre dans le potager de l'Assiette Champenoise | Interview pour le Champagne Abelé 1757

Au début des années 2000, mes parents faisaient le marché deux fois par semaine sur Reims (NDLR : Boulingrin et Avenue Jean Jaurès). Toute ma jeunesse, j’allais avec eux, j’étais au contact des gens, j’aidais mon père dans les champs pendant les vacances… Finalement, je suis rentré pour une raison simple : ça me manquait. L’endroit me manquait, ma famille me manquait… Il restait près de dix ans avant que mon père ne prenne sa retraite. Une période raisonnable pour une transmission en douceur entre ancienne et nouvelle génération. Et ça s’est très bien passé ! Petit à petit, j’ai repris des parts dans l’exploitation et j’ai doucement imposé ma vision.

La deuxième année de mon arrivée, on a commencé à travailler avec des restaurants gastronomiques malgré les réticences de mon père. Depuis tout petit, il me répétait que ces clients étaient compliqués, qu’ils avaient du mal à payer leurs factures et qu’ils allaient me compliquer la vie. Malgré tout, on s’est lancé dans l’aventure. Pendant cinq ans, j’ai refusé de prendre trop de clients. Nous voulions avoir des bases solides, des produits bien travaillés et des certitudes avant d’entrer dans cet univers de façon sérieuse. Une fois fait, on a ouvert la porte à d’autres chefs tout en restant sur un segment très premium.

Quinze ans plus tard, vous êtes considéré comme le « maraîcher des étoilés ». Comment expliquez-vous aujourd’hui cette reconnaissance de la part des chefs ?

Le gros coup d’accélérateur s’est produit lorsque nous avons commencé à travailler avec Arnaud Lallement (NDLR : Chef étoilé de l’Assiette Champenoise***). Quand vous êtes sur la carte d’un chef trois étoiles, tout change. Vous commencez à recevoir une quantité d’appels.

Lorsque nous avons commencé à travailler avec l’Assiette Champenoise, il n’y avait que vingt-six chefs trois étoiles en France. Aujourd’hui, il doit y en avoir une trentaine. C’est un tout petit milieu où ils se connaissent presque tous. Il y a aussi une clientèle qui vadrouille d’un trois étoiles à un autre et qui aime faire le tour pour découvrir.

Finalement, on a toujours mis le curseur sur une façon de faire du commerce différemment. Personnellement, je ne me considère pas comme un fournisseur. On travaille d’égal à égal avec Arnaud Lallement ou Emmanuel Renaut. C’est une vraie relation humaine. Impossible de travailler comme des dingues si on ne le fait pas par passion, voire par amitié pour certains. C’est ce qui rend les choses encore plus belles et simples.

En quinze ans, nous n’avons démarché absolument personne. Tout s’est fait très naturellement. Nous sommes même partis travailler en Asie ou en Suisse pour transmettre notre savoir-faire. Nous avons ouvert des fermes dans des pays ou les gens, les sols, la météo… Tout est différent. Il faut juste avoir l’esprit ouvert et se permettre des aventures en dehors des sentiers battus.

Quels sont les grands principes et valeurs qui dictent votre travail de maraîcher ?

La passion. C’est une évidence. Il faut être vraiment passionné, car c’est un métier très énergivore qui demande beaucoup d’organisation. Ce sont des choix de vie importants qui impactent tout le monde. Lorsque des projets nous emmènent au Mandarin Oriental de Bangkok, un restaurant deux étoiles tenu par un chef français Arnaud Dunand-Sauthier, toute la famille fait partie du voyage.

Initialement, Arnaud souhaitait recevoir des produits de France pour être cuisinés à Bangkok. J’ai commencé à me dire qu’il y avait un problème. On a pris le temps de se rencontrer pour échanger sur ses besoins. C’est là qu’il m’a expliqué sa situation. La réalité, c’est que 85 % des produits sont importés. Il n’y a pas de production, car les gens ne savent pas faire. C’est une culture très différente qui nécessite de tout leur apprendre. Nous avons eu l’idée de nous associer à plusieurs pour apporter un savoir-faire dans une ferme à 40 km de Bangkok. C’était un challenge hyper stimulant et une vraie aventure collective, avec ses bons et ses mauvais côtés.

À l’inverse, nous avons mené un autre projet au Cambodge. Lorsque nous sommes arrivés, nous avons engagé des gens qui étaient dans des situations très chaotiques. À tel point qu’une seule personne de l’équipe sur place savait écrire. En partant d’une feuille blanche, nous avons eu des résultats incroyables. Ils étaient d’une grande vivacité et comprenaient tout sans éducation.

En Thaïlande, l’erreur a été de penser que le management serait le même. Là-bas, un jeune de 25 ans avec un savoir-faire, n’aura jamais le dernier mot face à un ouvrier qui a 50 ans. La force de l’âge lui donne priorité en tant que chef… La mise en place a été longue à cause de ce type de problèmes récurrents.

Ce sont des écueils culturels qu’il faut comprendre. Mais c’est aussi une aventure humaine et un geste pour la planète. Si l’on avait suivi la demande initiale, il aurait fallu 12 heures de vol à nos légumes pour arriver à bon port. Pour résumer, la passion est indispensable. Après la pluie, le soleil… Il faut accepter les aléas comme un vigneron. Accepter de se prendre le gel, la grêle… Il faut avoir un peu de courage.

Quelle est la partie de votre métier que vous appréciez le plus ?

C’est compliqué de vous répondre. On en apprend tous les jours. Nous sommes à un niveau où l’on peut se permettre d’être un laboratoire à ciel ouvert : on peut essayer de faire pousser des légumes du monde entier, trouver des espèces et des variétés, tout ça sans stress parce que l’on sait que l’entreprise est sur les rails.

On se permet de jouer un petit peu maintenant qu’il n’y a plus ces obligations de résultats stricts. C’est captivant, car on part vraiment vers l’inconnu. On récupère des espèces qui poussent en Asie ou en Amérique du Sud que l’on tente de reproduire ici. Ça prend du temps, mais quand on y arrive, on est super content.

Le deuxième point que je trouve très intéressant, c’est de pouvoir travailler avec des chefs avec une grande proximité. Certains me demandent au détour d’une conversation « J’aimerais faire tel plat, mais ce légume-là, parfois il est un peu trop comme ça, ou un peu trop comme ça ».

Parfois, notre travail consiste à faire pousser les légumes pour avoir moins d’acidité, une couleur ou une taille particulière. On fait des essais, on se met en cuisine, on goûte pour se rendre compte du résultat et se dire « Effectivement, il y a ce petit côté-là qu’on va réussir à corriger ou tel autre ». C’est dans ces moments-là qu’on prend conscience que notre travail est hyper important. Ça nous stimule et nous donne envie de nous dépasser pour trouver des solutions.

Quelle est votre philosophie par rapport au « temps » ?

Il faut savoir être fataliste. Il y a quelques jours, des amis vignerons me racontaient la situation catastrophique dans les vignes : « Le mildiou, il y en a partout et on ne peut rien y faire. On récupérera ce que l’on peut, on va sélectionner, on fera du bon vin quand même, mais il y en aura moins. ».

Il m’arrive parfois de vivre la même chose et d’appeler Arnaud pour lui dire que certains de mes légumes éclatent. Et on ne peut rien y faire. Se mettre trop de pression ne sert à rien. On l’a de fait en travaillant avec des établissements très haut de gamme. Pour pouvoir continuer à vivre correctement cette expérience, il faut réussir à relative les choses et à ne faut surtout pas se prendre au sérieux.

Après, on a toujours vécu comme ça. Finalement, ce sont des questions que l’on ne se pose même pas. Qu’il fasse chaud, qu’il pleuve… On y va.

Benoit Deloffre dans le potager de l'Assiette Champenoise | Interview avec le Champagne Abelé 1757

Est-ce vous qui travaillez les légumes ou ce sont eux qui vous dictent un peu leur façon de faire ?

C’est plutôt 50/50. On a des objectifs lorsque l’on sème un produit. En gastronomie, un chef peut vous demander un oignon qui doit faire 4 cm de diamètre. Pour avoir le même plat à la carte toute la semaine, il faut pouvoir en produire 300 chaque semaine. Il faut suivre les cultures de façon quotidienne et savoir les arrêter quand c’est le bon moment. Si on laisse la nature faire, les légumes vont continuer à grossir et on n’obtiendra pas ce que l’on veut. C’est un travail constant qui demande de prendre des risques.

Il y a aussi des techniques que l’on utilise pour faire en sorte que les légumes restent petits. C’est aussi le leitmotiv de notre production : réussir à apporter dans l’assiette des produits entiers pour que la découverte soit didactique pour les gens.

Tous les ans, vous partez à la recherche de graines rares ou oubliées. Pourquoi vouloir à tout prix retrouver ces légumes, parfois disparus ou inadaptés, pour les remettre au goût du jour ?


Pour deux raisons. La première, c’est le temps nécessaire pour produire nous-mêmes. Cela serait beaucoup trop long, d’où un « marché de la graine ». Prenons l’exemple tout simple pour faire de bonnes tomates. Aujourd’hui, certains acteurs vous proposent des tomates qui vont tenir le transport en passant quatre jours dans un camion. Une fois arrivées à bon port, elles seront encore toutes jolies. La priorité pour un grainetier ira d’abord sur la production et le transport.

Nous sommes aux antipodes de cette logique. Notre priorité, c’est le goût, les textures… Mais pour obtenir les deux, il en résulte une certaine fragilité du légume. Pour réussir à produire qualitativement, ma femme et moi faisons beaucoup de recherches avec des grainetiers de conserveries pour obtenir des graines non hybrides : des races totalement pures et originales. Si vous prenez la variété de tomate la plus basique face à une tomate hybride, vous aurez un goût 100 fois supérieur.

La seconde, c’est de procurer des émotions. Le plus beau des compliments que l’on peut recevoir d’un chef ou d’un client particulier : « Ça me rappelle le jardin de ma grand-mère ». Une époque où l’on faisait encore les choses de façon raisonnées et raisonnables. Notre priorité est de retrouver ces goûts d’avant. Et les chefs sont très ouverts d’esprit face à cette démarche.

Qu’est-ce que les chefs étoilés attendent de vos légumes ?

Ce que nous leur proposons depuis une bonne dizaine d’années : une grande régularité dans l’approvisionnement. À notre niveau, on ne peut surtout pas se permettre d’avoir un légume avec un goût trop différent d’une semaine à une autre.

Et puis, il y a sans aucun doute le partage. La dimension émotionnelle impact énormément. Sur ce point, l’assemblage est bon. On arrive à communiquer clairement ce qu’on attend les uns des autres. Parfois, c’est la taille, la couleur, des fois la taille et la couleur, ou encore des nouveautés… C’est un peu comme un couple où l’on doit vivre les choses sans laisser la routine s’installer. Ça serait le pire dans ce métier.

À l’inverse, qu’est-ce que vous attendez de la part des chefs par rapport à vos légumes ?

Lorsqu’ils me disent : « Je veux tel produit », j’ai besoin de savoir ce qu’ils vont en faire. Parfois, ça ne me plaît pas… Si on arrive à produire des mini navets qui sont très difficiles à obtenir, ce n’est pas pour les mixer et en faire un siphon. Il faut être raisonnable.

En tant que maraîcher, on ne se rend pas compte de tous les gestes ou des obligations en cuisine. Il faudrait être à leurs côtés 24h/24… Mais on fait tout pour trouver la meilleure synergie.

Au final, il n’y a jamais d’animosité. Tout est fait de façon intelligente et sans prise de tête. Si on arrive à donner assez d’informations en cuisine pour expliquer notre façon de produire tel ou tel légume, les difficultés que l’on a rencontrées, les chefs respectent toujours le produit. Il faut toujours trouver des solutions.

En quoi vos légumes font-ils partie de l’expérience gastronomique ?

Nous avons la chance de travailler majoritairement avec des chefs trois étoiles. Leur concept est simple : une assiette, un légume star. Leur but est de retrouver la saveur originelle du produit. Ce n’est pas de le travestir avec une sauce au vin, sinon cela n’aurait plus de sens.

Il faut faire en sorte que le produit soit mis en valeur. L’aspect visuel est aussi très important. On évite d’avoir une assiette avec plein de légumes mélangés. Le client finirait par se perdre dans tout ce qu’il a dégusté. Par contre, si l’on choisit le céleri, on se donne à fond dans cette direction. Le légume doit être travaillé pour correspondre au plat qu’il va intégrer. Lorsque vous mangez un mini céleri bien préparé, vous avez le vrai goût du légume.C’est aussi pour cette raison que nous travaillons avec les chefs étoilés. Pour retrouver ces saveurs.

Texte – Geoffrey Chateau | Photo – Julien Gérard-Maizières

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